Dr Cottias - Opération / coude syndrome de compression du nerf cubital ou ulnaire au coude
Syndrome de compression du nerf cubital ou ulnaire au coude
Anatomie :
Le nerf cubital ou ulnaire a pour origine les racines de C7-C8-D1. De son origine à sa terminaison en deux branches terminales, il présente au cours de son trajet de multiples sites possibles de compression : rachidien, cervico-thoracique, défilé épitrochléo-olécranien et arcade du cubital antérieur, aponévrose profonde de l’avant-bras, canal de Guyon.
Le nerf cubital est tendu lors de la flexion du coude. Il est donc en situation d’étirement et doit pouvoir coulisser facilement pour les mouvements d’extension et de flexion du coude. Il est donc soumis à un étirement permanent dans le défilé épitrochléo-olécranien.
Description et symptômes :
On parle donc d’un syndrome canalaire par compression du nerf ulnaire au niveau du coude. Celui-ci entraîne des fourmillements au niveau du 5ème et du 4ème doigts (parfois des paresthésies, des brûlures, des sensations de bras lourd, des douleurs de l'aisselle ou des douleurs du sein ), pouvant aboutir à une perte de sensibilité de ces doigts et une fonte musculaire au niveau des muscles de la main (amyotrophie de la main : « main de singe », paralysie du 4 eme et 5 ème doigts, doigts malhabiles ou gourds). Ces douleurs peuvent être associées à des douleurs du coude (craquer le coude...) et de l'épaule, du bras ou du coude et du poignet, voire de l’épaule (postérieure ou douleur de l'omoplate), de la nuque (entrainant parfois des pseudo-migraines) ou de l’occiput. En effet, la douleur de l'omoplate ou de la scapula semblerait être spécifique de la compression du nerf cubital au coude (« La douleur de l’épaule et/ou de la scapula et son association avec un syndrome compressif nerveux» P. Cottias, D. BIAU, Ph. Anract ; 90 ème réunion de la SOFCOT, Palais des Congrès, à Paris novembre 2015 Paris. ; Les signes atypiques de compression du nerf cubital»P. Cottias, A. Verlière, V. Boulier, JP. Mousseaux, Ph. Anract 90 ème réunion de la SOFCOT, E-Poster Palais des Congrès, à Paris novembre 2015 Paris"). Il est possible d’avoir aussi des lésions de grattage ou de prurit sur le coude ou l'avant bras correspondant au trajet du nerf ou autre (lésion de type "eczéma"- "Le prurit et son association dans le syndrome du canal carpien et du nerf cubital au coude" - A propos d’une série de 26 patients- P. Cottias, D. BIAU, Ph Leclerc, Ph. Anract Journées Dermatologiques de Paris, (E-poster). Palais des Congrès, à Paris décembre 2016 Paris". ) ou des tremblements (voir vidéo sur youtube : "tremblement du poignet et des doigts"). L'atteinte du nerf cubital peut provoquer une raideur (blocage) du coude voir de l'épaule (capsulite asoosciée) même après une fracture opérée ou traitée par plâtre (fracture de la tête radiale, arrachement de l'apophyse coronoïde...).
Les douleurs, enfin, peuvent comme dans le canal carpien simuler une névralgie cervico-brachiale peut être par l'intermédiaire du ganglion stellaire (cf photo) ou étoilé ou ganglion cervicale inférieur (douleur du cou : cervicalgie, de l'épaule tendinite), du coude et du poignet et des doigts).
Le syndrome du nerf cubital est souvent associé à une compression du nerf médian au poignet (canal carpien).
Le diabète, les pathologies de la thyroide, la polyarthrite rhumatoïde ...favorisent ce syndrome.
Diagnostic :
A l’examen clinique, on peut retrouver des douleurs électriques lors de la percussion du nerf cubital au coude en arrière de l’épitrochlée (syndrome irritatif ou pseudo-Tinel), une diminution de la force de la main, notamment de la pince pouce-index, des difficultés dans les gestes fins associées à des douleurs électriques, un déficit sensitivo-moteur avec perte de l’abduction-adduction des doigts (signe de Watenberg), de trouble d’opposition-pouce DIV (« signe ou angle de Bourrel ») et de trouble d’écartement des doigts (« test de l’éventail »). Il peut s’ajouter une amyotrophie de la main (amyotrophie du 1 er interosseux donnant l’aspect de main de singe) et une paralysie des lombricaux (griffe cubitale ou main du Prédicateur avec hyper extension MP et flexion des IP). Il ne faut pas la confondre avec la flexion du doigt par rétraction.
Le tableau clinique peut-être révélateur aussi d’une compression du nerf médian associée.
Un bilan radiographique est pratiqué (radiographie standard coude et rachis cervical).
Un électromyogramme pourra confirmer le diagnostic de compression du nerf cubital au coude et précisera l’importance de l’atteinte en vérifiant que le nerf n’est pas comprimé à un autre endroit. Cet examen peut être normal (40 à 60% des cas selon les études) mais cela n’élimine pas le diagnostic. On recherchera aussi une éventuelle compression du nerf médian (souvent associée même si l’EMG est NORMAL, cf cas clinique de la photo "du nerf fibrillaire, comprimé" : la patiente avait des douleurs du coude à 8/10 avec une paralysie cubitale des doigts [doigts en crochet dans la paume]) alors que les 3 EMGS pratiqués sur 5 mois étaient normaux!).
On pourra là aussi s’aider de l’échographie et de l’IRM (voir photo) pour faire le diagnostic (aspect inflammatoire-blanc, nerf bifide , inflammatoire des parties molles ou de l'os médullaire en T2 sur l’IRM (hypertrophie nerveuse, aspect en sablier, perte aspect fasciculaire, oedème nerf...).
Le diagnostic est essentiellement clinique même en cas de négativité des examens complémentaires. Effectivement, le patient douloureux est souvent désespéré devant la négativité des différents examens.
( article ELSEVIER )
Traitement :
En l’absence de traitement, le nerf cubital risque de perdre sa fonction.
Dans les formes débutantes un traitement médical peut être initié : repos (attelle – coudière), infiltrations (corticoïdes à la gouttière du coude) et rééducation.
En cas d’échec du traitement médical, une intervention chirurgicale sera proposée.
L’intervention chirurgicale est le plus souvent réalisée sous anesthésie générale ou locorégionale.
Après incision au bord interne du coude, centrée sur le nerf cubital, l’intervention consiste en une décompression du nerf au niveau de ses trois principaux sites de compression au coude. Un geste osseux complémentaire peut parfois être nécessaire. Ensuite, une transposition du nerf cubital est nécessaire. Le nerf cubital est déplacé et mis en avant de l’épitrochlée et est stabilisé dans un tunnel sous-cutané par un lambeau graisseux.
Evolution :
L’hospitalisation est ambulatoire. La mobilisation des doigts et du coude est immédiate sous couvert d’anti-douleurs. La cicatrisation se fait en 10 à 15 jours avec une immobilisation par une attelle postérieure en légère flexion pendant 21 jours.
L’évolution est fonction de l’atteinte neurologique pré-opératoire. Dans les formes débutantes, les symptômes régressent en quelques semaines. Dans les formes plus sévères (bloc de conduction à l’EMG), les fourmillements ou la perte de sensibilité des deux doigts concernés peuvent persister quelque temps, la récupération est plus longue 6 à 12 mois.
Une période transitoire d’hypersensibilité réactionnelle peut également être observée. La force reste souvent limitée pendant plusieurs mois.
Complications :
Les plus fréquentes :
L’hématome : comme toute chirurgie, il existe un risque d’hématome qui se résorbe en règle générale tout seul. Il peut exceptionnellement nécessiter une ponction évacuatrice ou un drainage chirurgical.
L’algodystrophie est un phénomène douloureux et inflammatoire encore mal compris. Elle est traitée médicalement et peut durer plusieurs mois (voire parfois des années), entrainant une prise en charge spécifique avec rééducation adaptée, bilans complémentaires et parfois prise en charge spécifique de la douleur. Elle est imprévisible dans sa survenue comme dans son évolution et ses séquelles potentielles.
La récidive est possible ce d’autant qu’il existe une neuropathie (anomalie profonde du nerf).
Plus rarement
L’infection profonde est possible. Elle peut nécessiter une nouvelle chirurgie et un traitement prolongé par antibiotiques. Il est fortement déconseillé de fumer ou de consommer des substances réprimandées, pendant la période de cicatrisation, le tabagisme augmentant de manière significative le taux d’infection.
Une atteinte nerveuse du nerf ulnaire (pris dans un tissu fibreux cicatriciel ou section de celui-ci) est exceptionnelle. Par contre, la persistance de fourmillements ou de perte de sensibilité des deux doigts concernés est fréquente, la récupération se faisant très progressivement sur 3 mois à plus d’un an. Il est coutume de dire que durant les trois premiers mois, aucune modification par rapport à l’état pré opératoire n’est observée. Une période transitoire d’hypersensibilité réactionnelle peut également être observée.
Les cicatrices peuvent rester gonflées et sensibles pendant plusieurs semaines avec douleur à l’appui.
Une raideur temporaire du coude peut être observée et peut justifier une rééducation complémentaire.
Autres : syndrome de loge, phlébite, pyoderma gangrenosum…
MOTS-CLEFS :
Compression nerf cubital - Canal carpien - pseudo Tinel - Main de singe – Douleur de l’omoplate ou scapula - Douleur du sein - Douleur du coude - raideur du coude - Blocage du coude - Douleur de l'épaule et du coude - Douleur du coude et du poignet - Douleurs des deux derniers doigts ou douleurs des 4 et 5 emes doigts - Watenberg - Angle de Bourrel - Test éventail - Bloc de conduction - Griffe cubitale - Engourdissements des doigts - brûlures des doigts - Doigts morts - Névralgie cervico-brachiale – Electromyogramme - test infiltratif aux corticoïdes - Peinture et nerf cubital - main du prédicateur - capsulite épaule - algodystrophie - fibromyalgie